Les émotions en entreprise, pour quoi faire ? 

juillet 2024Boîte à outils

Pendant très longtemps, ne pas montrer ses émotions en entreprise a été le signe d’une grande maîtrise de soi et d’une capacité à être un « bon élément ».

Dans cet article, nous allons démystifier ce qu’est réellement une « émotion » et comment elle se déclenche.

Nous explorons également de quelle manière nous pouvons influencer nos émotions, en nous intéressant au lien entre notre système de pensées, nos ressentis et nos comportements.

Nous terminerons sur l’intérêt de la prise en compte des émotions en entreprise, quelle que soit sa position dans l’organisation.

Au programme :

1. Des émotions : pour quoi faire ?

› Qu’est-ce qu’une émotion ?

› 100 ans d’histoire : de Charles Darwin à Paul Ekman

2. Les actions cachées derrières nos émotions

› Décryptage des émotions primaires et des actions cachées

› Comment se déclenche une émotion ?

3. Comprendre ses émotions pour mieux agir

› Le circuit des émotions

› La boucle d’auto validation de nos croyances

4. Le mot de la fin

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1. Des émotions : pour quoi faire ?

Qu’est-ce qu’une émotion ?

Une émotion est issue d’un signal électrochimique interne qui nous alerte d’un changement intérieur ou extérieur à notre corps.

  • Ce changement crée un déséquilibre qui nécessite une action pour s’adapter à notre environnement et retrouver un état stable.
  • S’adapter c’est agir et donc entrer en mouvement pour retrouver une zone de confort, et parfois pour survivre…

Si comme moi, vous aimez vous pencher sur l’étymologie, l’origine du mot « Émotion » mérite qu’on y prête attention.

« Émotion » vient du latin « Movere » qui signifie « se Mouvoir » et « EX » qui indique « vers l’extérieur ».

Littéralement, le terme « Émotion » est une invitation à se mettre en mouvement, une incitation au passage à l’action.

100 ans d’histoire : de Charles Darwin à Paul Ekman

Tout le monde connait Charles Darwin pour sa théorie sur l’évolution des espèces et son livre « L’origine des espèces » dont la première édition date de 1859.

Moins nombreux sont celles et ceux qui connaissent ses travaux sur la comparaison des expressions entre les humains et les animaux.
Il publie en 1872 un ouvrage sur le sujet « L’Expression des émotions chez l’homme et les animaux » (titre original : The Expression of the Emotions in Man and Animals) qui va inspirer cent ans plus tard le psychologue américain Paul Ekman.

Paul Ekman a été l’un des pionniers dans l’étude des émotions.
Il affirme que les expressions du visage traduisent des émotions universelles, telles que la colère, la peur, la joie, la tristesse, la surprise, le dégoût ou le mépris. Ce sont les émotions dites « primaires » qui se distinguent des autres émotions, dites « secondaires », plus complexes et représentent une combinaison des émotions primaires et des croyances ou culture de chaque personne.

Il développe par ailleurs des travaux de recherche sur la détection de mensonge en s’appuyant sur les micro-expressions du visage et l’observation globale du comportement du corps.

Le saviez-vous ?

Ces travaux ont inspiré la série américaine « Lie To Me » où le personnage principal le Dr Lightman, à l’image de Paul Ekman, est un scientifique spécialisé dans la détection de mensonges par l’analyse des micro-expressions faciales.

Dans la série, il propose les services de son équipe à la police fédérale dans la résolution d’enquêtes criminelles.

2. Les actions cachées derrières nos émotions 

Décryptage des émotions primaires et des actions cachées

Chaque émotion est un appel à l’action, c’est-à-dire qu’elle fournit une information sur un déséquilibre et il nous est utile d’écouter pour nous adapter. Ainsi, il n’y a pas d’émotions positives ou négatives.

Ce sont nos comportements et les conséquences liées qui sont agréables ou désagréables.

Parmi toutes les émotions, certaines sont quasi instinctives et partagées de tous dès le plus jeune âge et les actions liées sont quasi automatiques.
Elles sont appelées les émotions primaires et sont au nombre de 4 à 7, en fonction des études auxquelles on se réfère.

On compte notamment, la peur, la colère, la tristesse et la joie, et en vision plus étendue : la surprise, le dégoût et le mépris.

La peur et la colère sont des émotions assez proches car appellent toutes les deux à une action « Urgente ».

La peur est déclenchée par la perception d’une menace ou d’un danger. Elle provoque un état de stress.

Au niveau du corps, nous avons une sensation de froid, nos muscles se crispent.

Son message est de Fuir ! « Sauves-toi, Fuis, cette chose ou cet environnement est plus fort que toi »… ou à se mettre en position de défense pour assurer sa protection.

La colère est déclenchée par la perception d’une menace pour atteindre notre objectif.
Elle crée l’agressivité face à cette interférence pour fournir l’énergie nécessaire pour franchir un obstacle ou repousser une idée.

Physiquement, nous ressentons de la chaleur au niveau du haut du corps, de la tête avec un effet parfois de “cocotte minute” jusque dans nos bras, nos poings.

Elle nous dit de « Nous Battre » pour nos idées, ou pour changer une situation que l’on estime comme injuste ou insupportable.

La tristesse et la Joie sont aussi appelées « émotions sociales ». Elles contribuent à notre intégration au sein d’un groupe de personnes.

La joie est liée à un moment de plaisir et est la plus communicative au sein d’un groupe.

Elle nous permet de créer la relation avec les autres, car elle se partage facilement. C’est une émotion agréable voire « positive ». Cette émotion permet également d’envoyer un signal d’attitude amicale.

 

Nous ressentons de la chaleur douce qui rayonne dans tout notre corps.

Cette émotion nous pousse à apprécier et cultiver ce qui nous fait du bien, et à renforcer les liens positifs en partageant ce bien-être.

La tristesse est liée à la perte d’un objet ou d’une personne, ou en lien à une situation évaluée en échec.

Au niveau du corps, on se sent comme faible, en manque d’énergie, la gorge serrée, les yeux douloureux jusqu’aux larmes.

La tristesse nous indique qu’il faut passer à autre chose, tout en nous permettant de ralentir pour nous reposer et prendre du recul.

La manifestation de la tristesse signale à notre entourage que nous avons besoin de soutien, de réconfort ou de compassion. Cette émotion aide ainsi à maintenir voire à consolider les relations entre les personnes en créant des moments de compréhension, d’empathie et de solidarité.

S’il est parfois difficile de reconnaître nos émotions, il peut être encore plus challengeant de repérer les émotions chez les autres, nos proches, nos clients, nos collaborateurs ou notre manager.

Décrypter l’émotion de notre interlocuteur est une clé pour améliorer nos relations professionnelles, si nous nous préservons du jugement ou de l’interprétation de ce que l’autre ressent.

Comment se déclenche une émotion ?

Avant qu’une émotion ne survienne, nous pouvons considérer que nous sommes dans un état « neutre ».

Survient alors un élément déclencheur qui change notre perception : un événement réel ou imaginaire, une personne ou une chose provenant du présent, du passé ou projeté dans le futur.

Notre cerveau perçoit cet événement et l’analyse de manière automatique en s’appuyant sur notre système de pensées, nos expériences passées ou notre projection de la réalité induite par nos croyances.

À l’issue de cette analyse, notre cerveau décide quelle émotion ressentir.

Puis comme nous l’avons vu, cette émotion primaire ou secondaire nous conduit à une action ou à un comportement pour nous adapter à cet événement. Il s’en suit un résultat ou une conséquence.

Si nous prenons un exemple (très) simple :

Un collègue ouvre la fenêtre et je ressens un courant d’air.

Mon système de pensées indique à mon cerveau qu’à chaque fois que je suis en courant d’air, je peux attraper froid.

L’émotion produite est celle de la peur d’avoir une nouvelle extinction de voix.

Mon corps frissonne, et je décide de mettre une écharpe.

Le résultat est que je me retrouve à nouveau dans une situation de confort, adaptée pour poursuivre mon travail.

Chaque émotion primaire a une action cachée qui influence directement notre comportement et nos interactions.

Comprendre nos émotions et leurs déclencheurs nous permet de mieux gérer nos réactions, et de nous adapter plus efficacement et de manière adaptée lors des phases de transformation de notre environnement professionnel.

3. Comprendre ses émotions pour mieux agir

Le circuit des émotions

Le déclenchement d’une émotion est donc lié à un changement d’une situation ou de l’environnement dans lequel nous nous trouvons, auquel nous devons nous adapter.

Le schéma précédent peut également être représenté sous la forme d’une boucle, appelée parfois également « le circuit des émotions » où notre système de pensées et de croyances prend une place centrale.

Il offre ainsi à notre cerveau la capacité d’évaluer très rapidement la situation pour nous permettre de nous adapter de manière quasi automatique.

Par exemple :

Événement

Un collaborateur reçoit une critique de la part de son manager sur la qualité de son travail.

Évaluation via son schéma de pensée

Il perçoit cet événement comme une menace de son estime de soi.

Réponse émotionnelle

Il ressent de la frustration, une émotion secondaire entre colère et tristesse.

Comportement ou Action provoquée

Ce collaborateur peut aller à la confrontation et adopter un comportement agressif vis-à-vis de son manager voire de ses collègues de travail.

Résultat

Une tension se crée entre ce collaborateur et son manager, et l’ambiance au sein de l’équipe se tend et peut devenir stressante.

Explication du circuit des émotions :

1.

Notre cerveau perçoit cet événement ou cette situation, considéré comme un élément « déclencheur ».

2.

Notre cerveau évalue l’importance de cet événement en s’appuyant sur notre système de pensées et de croyance.

3.

Nous ressentons une émotion en fonction de cette évaluation.

4.

Nous réagissons à cette émotion par un comportement spécifique adapté ou inadapté.

5.

Cette action engendre un résultat positif ou négatif.

La boucle d’auto validation de nos croyances

En jouant plusieurs fois le circuit des émotions pour un même événement déclencheur, on voit que plus nous avons une croyance forte, plus l’émotion liée sera automatique et le comportement lié sera renforcé.

Pour être plus clair :

  • Plus nous croyons que quelque chose est vrai, 
  • Plus notre cerveau va aller chercher des éléments pour prouver que ce que nous croyons est vrai, tout en minimisant les preuves contraires.

Ce biais de confirmation crée une boucle d’auto validation où nos croyances initiales façonnent nos perceptions et expériences, qui à leur tour renforcent ces croyances, les rendant de plus en plus ancrées.

Si nos croyances nous permettent d’arriver à un résultat adéquat et positif, on parle de croyance « aidante ».

Si le résultat paraît inadéquat, la croyance sous-jacente est appelée croyance « limitante ».

Par exemple, une personne persuadée de ne pas être au niveau dans son poste pourrait interpréter toute critique comme une confirmation de son manque de compétences, tout en ayant du mal à entendre les retours positifs et les compliments.

Cette dynamique peut être limitante car elle empêche la remise en question et la possibilité d’élargir son cadre de référence.
Comprendre ce mécanisme est essentiel pour développer une pensée plus critique et ouverte, permettant ainsi de sortir de cette boucle et de réévaluer plus objectivement notre perception des évènements.

“La folie c'est de faire toujours la même chose et de s'attendre à un résultat différent.”

Albert Einstein

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Quand nous avons l’impression que les choses se produisent « toujours » de la même manière, avec le même résultat, c’est le signe d’un besoin de conscientisation de nos pensées automatiques et de notre système de croyances.

Ce travail est essentiel pour changer nos interprétations d’une situation et nous permettre d’avoir un impact sur nos émotions et les comportements engendrés pour qu’ils soient plus agréables.

Le mot de la fin

Nos émotions en entreprise sont des alliées précieuses : elles nous aident à nous adapter à notre environnement et à comprendre les autres.

Loin d’être une faiblesse, les émotions, lorsque l’on s’autorise à les écouter, deviennent des leviers puissants pour améliorer la performance professionnelle et renforcer les liens au sein des équipes. 

Pour autant, écouter et comprendre ses émotions ne suffit pas toujours.
Pour bien gérer son évolution de carrière, il peut être nécessaire de prendre du recul face à nos comportements notamment quand ils semblent inadéquats pour remettre en perspective notre perception et notre système de croyance.

Écouter ses émotions et prendre en compte les émotions des autres sont des compétences qui encouragent la mise en place au sein des entreprises d’un environnement de travail harmonieux, stimulant la créativité et l’innovation. 

Développer l’intelligence émotionnelle au sein des entreprises contribue à une meilleure prise de décision, une réduction du stress et une plus grande résilience face aux défis.

Reconnaître et valoriser les émotions en entreprise est essentiel pour naviguer avec succès dans la vie professionnelle et personnelle, et pour construire un avenir où chaque individu peut s’épanouir pleinement.

QUI SUIS-JE ?

Manager agile, experte des transformations numériques et d’entreprise, j’interviens régulièrement en accompagnement de personnes, d’équipes et d’organisations.

J’ai la conviction que provoquer et mettre en œuvre le changement est souvent la solution pour atteindre un objectif ou gérer une problématique complexe.